Le suicide dans les textes de Freud

Voici les principales références de Freud au suicide dans ses textes. Je compte compléter cette page au fur et à mesure. Certains de ces textes font l’objet d’un commentaire dans ce blog.

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Freud S., « Manuscrit N » (31 mai 1897), Naissance de la psychanalyse, 1956

« Les pulsions hostiles à l’endroit des parents (désir de leur mort) sont également partie intégrante des névroses. Elles viennent consciemment au jour sous la forme d’idées obsessionnelles. Dans la paranoïa, les délires de persécution les plus graves (méfiance pathologique à l’égard des chefs, des monarques) émanent de ces pulsions. Elles se trouvent refoulées dans les périodes où les sentiments de pitié pour les parents l’emportent – au moment de leurs maladies, de leur mort. Dans le deuils, les sentiments de remords se manifestent, alors on se reproche leur mort (c’est ce que l’on décrit sous le nom de mélancolies) ou bien l’on se punit soi-même sur le mode hystérique, en étant malades comme eux (idée de rachat). L’identification n’est alors, comme on voit, qu’un mode de penser et ne nous délie pas de l’obligation de rechercher les motifs », p. 183.

« Le mécanisme de la création poétique est le même que celui des fantasmes hystériques. Goethe prête à Werther quelque chose de vécu : son propre amour pour Lotte Kästner et, en même temps, quelque chose dont il a entendu parler : le sort du Jérusalem qui se suicida. Goethe jour probablement avec l’idée de suicide et y trouve un point de contact qui lui permet de s’identifier à Jérusalem. Il prêt à celui-ci des motifs tirés de sa propre histoire d’amour. C’est un moyen de ce fantasme qu’il se prémunit contre les conséquences de sa propre histoire », p. 184

Les premiers psychanalystes, Minutes de la Société psychanalytique de Vienne, trad. N. Bakman, Gallimard, Paris, 1976, I, 1908-1910, séance du 13 02 1907, p. 136

« Le suicide est l’apogée de l’auto-érotisme négatif »

Les premiers psychanalystes, Minutes de la Société psychanalytique de Vienne, trad. N. Bakman, Gallimard, Paris, 1978, II, séance du 24 03 1909, p. 180-181

« La différence dans la forme de suicide choisie par les deux sexes illustre que le symbolisme s’étend jusqu’à la mort. Le choix des moyens du suicide révèle le symbolisme sexuel le plus primitif, que nous connaissons depuis longtemps. Un homme se tue avec un revolver, c’est-à-dire qu’il joue avec son pénis, ou bien il se pend, c’est-à-dire qu’il devient quelque chose qui pend de toute sa longueur, un « pénis » (« pendere ») ».

Les premiers psychanalystes, Minutes de la Société psychanalytique de Vienne, trad. N. Bakman, Gallimard, Paris, 1976, II, p. 481-482

« Le suicide ne serait pas tant une conséquence qu’un substitut de la psychose, bien que les deux formes puisse bien entendu se combiner à un degré quelconque »

(…) « On a l’impression que, dans beaucoup de cas, c’est la peur de l’inceste qui mène les enfants au suicide »

(…) « Pour l’instant, nous pouvons accepter sans hésiter la thèse (…) selon laquelle, dans le suicide, la pulsion de vie est vaincue par la libido (dans ce texte, Freud oppose la pulsion du moi et les pulsions sexuelles».

(…) « Il serait intéressant d’établir si le désespoir d’être jamais aimé est effectivement chaque fois la condition du suicide (des écoliers) ; la formule a quelque chose de séduisant »

Sigmund Freud – Ludwig Binswanger : correspondance, 1908-1938, trad. R. Menahem et M. Strauss, Calmann-Lévy, Paris, 1995, 02 05 1909 p. 74, ou 1970 p. 283

Les remarques de Freud sont les même que dans la séance des Minutes de la Société Psychanalytique de Vienne, séance du 24 03 1909.

Freud S., Psychopathologie de la vie quotidienne, 1901, édition de 1923, trad. S. Jankélévitch, PBP, Payot, 1990, p. 207-214

Le suicide et le désir de suicide sous ses formes « inconscientes ». Dans cet ouvrage, le suicide est vu comme un acte manqué. Le suicide peut-il accéder au statut d’un symptôme ?

Freud S., Totem et tabou, trad. S. Jankélévitch, PBP, Payot, 1992, 1912-1913, p. 230 ou 307 selon l’édition

“D’après la loi du talion, qui est profondément enracinée dans la sensibilité humaine, un meurtre ne peut être expié que par le sacrifice d’une autre vie ; le sacrifice de soi renvoie à un crime de sang ».

Note 2 : « Les impulsions suicidaires de nos névrosés se révèlent régulièrement être des autopunitions pour des désirs de mort dirigés contre autrui ».

Freud S., « Considérations actuelles sur la guerre et sur la mort » (1915), Essais de psychanalyse, petite bibliothèque Payot, 15, Paris, Payot, 1981, (Article en ligne). Commentaire de cet article.

« Notre propre mort ne nous est pas représentable et aussi souvent que nous tentons de nous la représenter nous pouvons remarquer qu’en réalité nous continuons à être là en tant que spectateur. C’est pourquoi dans l’école psychanalytique on a pu oser cette déclaration : personne, au fond, ne croit à sa propre mort ou, ce qui revient au même : dans l’inconscient, chacun de nous est persuadé de son immortalité ».

« Ne devons-nous pas convenir qu’avec notre attitude de civilisé à l’égard de la mort nous avons, une fois encore, vécu psychologiquement au-dessus de nos moyens et ne devons-nous pas faire demi-tour et confesser la vérité ? Ne vaudrait-il pas mieux faire à la mort, dans la réalité et dans nos pensées, la place qui lui revient et laisser un peu plus se manifester notre attitude inconsciente à l’égard de la mort, que nous avons jusqu’à présent si soigneusement réprimée. (…) cela présente l’avantage de mieux tenir compte de la vraisemblance et de nous rendre la vie de nouveau plus supportable. Supporter la vie reste bien le premier devoir de tous les vivants. L’illusion perd toute valeur quand elle nous en empêche. (…) Si tu veux supporter la vie, organise-toi pour la mort ».

Freud, « Deuil et mélancolie », Métapsychologie, Gallimard, Paris, 1991, p. 160-161

« Ainsi, l’investissement d’amour du mélancolique pour son objet a connu un double destin ; il a, pour une part, régressé à l’identification mais, pour une autre part, sous l’influence du conflit d’ambivalence, il a été reporté au stade du sadisme, qui en est plus proche. Nous avons reconnu, comme état originaire d’où provient la vie pulsionnelle, un si prodigieux amour de soi de la part du moi, nous voyons se libérer, dans l’angoisse qui survient quand la vie est menacée, un montant si gigantesque de libido narcissique, que nous ne saisissons pas comment ce moi peut consentir à son auto-destruction (…) il n’est pas de névrosé, éprouvant des intentions suicidaires qui n’en ait fait retour sur soi à partir d’une impulsion meurtrière contre d’autre (…) L’analyse de la mélancolie nous enseigne que le moi ne peut se tuer que lorsqu’il peut, de par le retour de l’investissement d’objet, se traiter lui-même comme un objet, lorsqu’il lui est loisible de diriger contre soi l’hostilité qui concerne un objet (…) Ainsi, dans la régression à partir du choix d’objet narcissique, l’objet a certes été supprimé, mais il s’est pourtant avéré plus puissant que le moi lui-même. Dans les deux situations opposées, celle de l’état amoureux le plus extrême et celle du suicide, le moi, bien que par des voies tout à fait distinctes, est terrassé par l’objet ».

Freud S., « Sur la psychogenèse d’un cas d’homosexualité féminine », Névrose, psychose et perversion, PUF, Paris, 1974, p. 261

« Peut-être personne ne trouve l’énergie psychique pour se tuer si premièrement il ne tue pas du même coup un objet avec lequel il s’est identifié, et deuxièmement ne retourne par là contre lui-même un désir de mort qui était dirigé contre une autre personne ».

Note 2 : « Ces interprétations du mode de suicide par des accomplissements de désirs sexuels sont depuis longtemps familières à tous les analystes (s’empoisonner = devenir enceinte ; se noyer = enfanter ; se précipiter d’une hauteur = accoucher) ».