Le suicide de quelques médecins traduit-il la mort de l'ensemble du système de santé français ?

Le Dr Delépine évoque les suicides de certains médecins : le « patron de la pneumologie à Nevers » et le Dr Gressé, médecin du travail. Ces suicides sont interprétés en rapport avec la restructuration en cours de l’hôpital. Et de suggérer le « massacre programmé du système de santé » français !
Mais, la prise de position du Dr Delépine donne l’impression d’un mélange hardi de préoccupations professionnelles et des soucis d’organisation institutionnelle hospitalière. L’auteure parvient-elle à éviter l’amalgame et l’erreur ? Ne s’agit-il pas de l’instrumentalisation du suicide de quelques malheureux ?
Toujours est-il que le mouvement de restructuration de l’hôpital public est remis en cause. Plus précisément, la méthode employée d’un management qui serait le même que pour Renault et France Telecom. « La même agence de consulting chargée de restructurer FranceTélécom et EDF avec les conséquences que tout le monde connaît… s’occupe depuis les dernières années de restructurer la santé publique ».
Faut-il rappeler que la méthode en question est cognitivo-comportementale, promue par le Pr Légeron sous l’emblème des RPS (Risques Psycho-Sociaux) ? Lire cette synthèse sur le sujet. Continuer la lecture de « Le suicide de quelques médecins traduit-il la mort de l'ensemble du système de santé français ? »

Elle fabriquait des ipads….

L’exploitation du travail de l’homme par l’homme, existe ! Elle se trouve en Chine.

Et nous en sommes les exploitants !

Tian Yu, employé par Foxconn, un sous-traitant de Apple, qui fabrique les ipads, travaille 12 heures par jours, six jours par semaine, sous-payée et vivant loin de sa famille. Elle s’est jetée par la fenêtre le 17 mars 2020. Continuer la lecture de « Elle fabriquait des ipads…. »

Le suicide n'est pas la seule réponse politique possible !

La tribune de Marcela Iacub est claire et nette ! Il existe d’autres réponses politiques possibles à formuler dans les situations de crise. Il y a d’autres façons de contester.
Mais, privilégier le suicide comme seule et unique réponse possible, relève du symptôme. Cette idée tendancieuse signe la « psychologisation » du rapport de force entre le capital et le travail. Elle revient à effacer et censurer toute idée d’exploitation. Or, il s’agit de ne pas en oublier la réalité.
Il est très utile de lire son article paru dans Libération, le 17 mai 2013 : « Depuis quelques années, les conditions de travail provoqueraient des suicides. Les médias (Libération du 29 avril) ne cessent de souligner ce «phénomène nouveau» comme si les rapports de causalité entre le mal au travail et le suicide étaient évidents. Comme si ce geste ultime était une réaction aussi banale face à l’adversité au travail qu’une crise de nerfs ou une dépression nerveuse. Les travailleurs qui souffrent ont pourtant d’autres issues que de se suicider « . Lire la suite

La dimension collective au travail compte autant que la dimension individuelle (Pr Debout)

Le Pr Michel Debout prend position en faveur d’un « observatoire des conduites violentes » pour développer une « médecine de la perte d’emploi ». 
Serge Carnasse a interviewé le Pr Michel Debout, président de l’Union Nationale pour la Prévention du Suicide, au mois d’avril 2012. Voici un résumé succinct de ses propos. Continuer la lecture de « La dimension collective au travail compte autant que la dimension individuelle (Pr Debout) »

L'état doit payer

La crise financière européenne serait-elle un nouveau jour qui se lèverait sur le champ de la compréhension du suicide ? La presse relaie-t-elle une thématique nouvelle en matière de suicide ? Il semblerait qu’une nouvelle dimension du suicide vienne d’émerger. Certains suicides seraient un appel à ce que l’état assure la survie des citoyens. Il s’agirait de se faire payer ou mourir.
La presse se fait le relais d’annonces centrées par l’idée que la crise financière européenne alimenterait le suicide, en augmentant sa fréquence. De fait, les articles se focalisent sur qui cela peut-il toucher. Quelles sont les personnes concernées par la crise qui seraient plus sensibles à l’idée du suicide ? Continuer la lecture de « L'état doit payer »

Le suicide reconnu comme maladie professionnelle

L’Assurance Maladie a requalifié le suicide d’un salarié de France Telecom Orange en maladie professionnelle. Le comité régional de reconnaissance des maladies professionnelles de Besançon dans le Doubs vient de reconnaître que le suicide de Nicolas Grenoville, un employé de France Télécom, est bien « d’origine professionnelle ». Continuer la lecture de « Le suicide reconnu comme maladie professionnelle »

Suicide et activité professionnelle, rapport de l'INVS

Les premières données statistiques sur le suicide au travail viennent de sortir. Elle sont présentées par C. Cohidon, B. Geoffroy-Perez, A. Fouquet, C. Le Naour, M. Goldberg et E. Imbernon (INVS : Institut National de Veille Sanitaire) dans un rapport intitulé : « Suicide et activité professionnelle en France, premières exploitations de données disponibles ».
L’avantage de la « science » statistique, c’est de permettre, grâce à la manipulation des chiffres, de dire que le nombre de suicides au travail n’a pas augmenté quand l’opinion publique a l’intuition du contraire ! Et de prétendre en plus que cette assertion est vraie, scientifique, argumentée et par là même, prouvée !
Derrière cet énorme écran de fumée, remarquez bien une chose : ce rapport n’aborde surtout pas la question de savoir pourquoi les gens pourraient-ils bien se suicider à cause de leur travail ?
En psychanalyse, au contraire, nous ne donnons pas notre langue au chat. Nous tournons notre langue dans notre bouche et puis nous tentons de dire pourquoi une personne tente de mourir.
Voici la conclusion du rapport de l’INVS :

« La conduite suicidaire est un processus complexe et multifactoriel. S’il est aujourd’hui difficile de comptabiliser le
nombre exact de suicides en lien avec le travail, il existe néanmoins certaines données permettant d’approcher cette
problématique. Cette étude a pour objectif de décrire la mortalité par suicide et son évolution au cours du temps
dans la population des salariés (hommes) selon les secteurs d’activité auxquels ils appartiennent.
La description de la mortalité par suicide provient du projet Cosmop du Département santé travail de l’InVS.
Il s’appuie sur les données issues du panel DADS (Déclaration annuelle des données sociales) de l’Insee
(Institut national de la statistique et des études économiques) couplées aux causes médicales de décès du CépiDc
(Centre d’épidémiologie sur les causes médicales de décès) de l’Inserm (Institut national de la santé et de la recherche
médicale). Les taux de mortalité par suicide (standardisés sur l’âge) ont été calculés chaque année de 1976 à 2002
selon le secteur d’activité de l’employeur et le groupe socioprofessionnel du salarié.
Sur la période 1976-2002, le taux standardisé de mortalité par suicide est estimé à 25,1/100 000 (en population
ce taux est de 33,4/100 000, même standardisation). On ne constate pas d’évolution notable au cours du temps.
En revanche, les taux de mortalité diffèrent sensiblement selon les secteurs d’activité. Le secteur de la santé
et de l’action sociale présente le taux de mortalité par suicide le plus élevé (34,3/100 000) puis viennent ensuite
les secteurs de l’administration publique (en dehors de la fonction publique d’État) (29,8/100 000), de la construction
(27,3/100000) et de l’immobilier (26,7/100 000). L’analyse par groupe socioprofessionnel montre des taux de mortalité
près de trois fois plus élevés chez les employés et surtout chez les ouvriers par rapport aux cadres.
Cette étude montre des inégalités de mortalité par suicide selon les secteurs d’activité. On observe, en revanche,
une relative stabilité dans le temps dans cette population au travail entre 1976 et 2002, superposable à l’évolution
observée en population générale. Malgré certaines limites (en particulier l’absence de la population d’étude
de salariés de la fonction publique d’État) cette étude permet de proposer une première approche des liens entre suicide et activité professionnelle en France ».

Consulter le Rapport de l’INVS : « Suicide et activité professionnelle en France, premières exploitations de données disponibles »

Défenestration à la BNP : la direction n'a pas "constaté de situation alarmante !"

Les suicides à la BNP Paribas sont loin d’être clairs ! Malgré la démarche des syndicats, la réunion d’un comité d’hygiène et de sécurité (CHSCT) en urgence et l’enquête de Didier Arnaud de Libération, les circonstances du décès d’une cadre supérieure de la banque restent obscures.
Ghislaine était « déontologue » de la banque. Une fonction dont peu de gens connaissaient l’existence avant d’apprendre ce décès. Pour le public des usagers, profanes des us et coutumes de la banque, il y avait la « médiation ». Mais, qui pouvait bien connaitre l’existence de la « déontologie » dans une banque ?
La réponse de la direction de la BNP est franchement anti-Wikileaks : circulez, il n’y a rien à voir ! Nous n’avons pas « constaté de situation alarmante dans l’entité dans laquelle  » elle travaillait. Et si, d’aventure, vous cherchiez à établir un lien de cause à effet, la direction vous avertit immédiatement : « il faut rester prudent avant de tirer des conclusions ». Autrement dit, n’y regardez pas de trop près !
Clairement, c’est obscur !
Ci-dessous, figure le début du récit de Didier Arnaud
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Suicide en sourdine à la BNP Paribas

Libération, le 22 12 2010

Après la mort, en octobre, d’une cadre qui s’était heurtée à un supérieur, et devant le mutisme de la direction, des collègues ont saisi les syndicats.

Par DIDIER ARNAUD

Ghislaine, 44 ans, mère de deux enfants, est cadre à la BNP Paribas, à Paris. Elle travaille tard le soir. Le week-end, elle rapporte ses dossiers chez elle. Elle a du mal à faire face. Ghislaine demande une assistante pour la seconder. La veille d’un week-end, un directeur commercial, apparemment en désaccord avec elle, surgit dans son bureau, un club de golf à la main. Très vite, le ton monte, des collègues se précipitent dans le bureau de Ghislaine, pour séparer les protagonistes. Quelque temps après, elle s’ouvre de cette altercation à son directeur général. «Il lui a répondu qu’il partait en vacances et qu’ils verraient cela à son retour», assure Marc Cohen-Solal, syndicaliste à la CGT. Le directeur général lui reproche de «surréagir», lâchant en substance : «Vous l’avez peut-être un peu cherché.»
«Déontologue». Quelques jours après, le 23 octobre, Ghislaine se donne la mort. Elle ne laisse aucune trace écrite. Ghislaine était «déontologue», un poste de cadre supérieur. Il y en a 2 000 comme elle à la BNP Paribas. Un travail qui consiste à s’assurer, via des contrôles, que les règles juridiques et éthiques de l’activité bancaire sont respectées.
La suite de l’article sur le site de Libération

Le suicide d'un policier est-il une "mort en service" ?

Nous pouvons voir depuis peu de temps, un reportage de « FPC, briser le silence » sur le suicide dans la police.
En effet, il est attendu d’un policier qu’il soit capable de supporter l’hostilité, la violence, le mépris et les insultes du public. Si sa fonction professionnelle comporte cela, alors un policier qui se suicide devrait être considéré comme « mort en service ». C’est ce que la soeur d’un policier qui s’est tiré une balle dans la tête propose dans le reportage.
Selon FPC, il y aurait eu 700 suicides dans la police depuis octobre 1996, donc depuis 14 ans, soit 50 par an.

Le lien entre arrêt de travail et suicide

L’équipe du Dr Maria Melchior, de l’Inserm, vient de sortir une étude baptisée Gazel. Cette étude porte sur les agents EDF et GDF. La question est de savoir quel est le lien entre les arrêts de travail et leur santé. Il apparait que les pathologies psychiatriques et le suicide sont très présents au cours de ces arrêts de travail. Mais les questions posées ne sont pas les bonnes.
Cette étude est assez conséquente : depuis 1989 et portant sur près de 20 000 employés. Elle est « prospective », c’est-à-dire que les chercheurs sont censés ne pas avoir d’à priori, qu’ils recueillent les infos au fur et à mesure au cours des années, puis font le point à la fin. En principe, si de nouvelles questions se posent en cours de route, elles sont exclues puisqu’elles n’ont pas été évoquée au début de l’étude. C’est l’inconvénient de ce système.
Par exemple, si l’on en vient à suspecter le rôle du nouveau management dans l’apparition des maladies, et bien ce problème ne fera pas partie de l’étude.
Un autre exemple de question que ce genre d’étude ne pourra jamais se poser : la séparation des deux entreprises en EDF et GDF. Comment la nouvelle répartition des agents et la façon dont elle est décidée peut-elle peser sur les agents. Ne serait-il pas concevable qu’une nomination imposée à un endroit qui ne vous convient pas vous pousse à l’acte ?
En somme c’est assez simple la statistique : en limitant les questions à poser, on évite de se lancer dans les réponses foireuses !
Ceci dit, les résultats paraissent bien modestes. Oui, c’est vrai, on se suicide beaucoup parmi les agents absents. On en meure même beaucoup…
Mais, restons « prudents », le Dr Melchior se garde bien de « conclure que l’arrêt de maladie pour raisons psychiatriques est la cause du décès par le suicide », n’est-ce pas. Il s’agirait de ne pas mettre en cause l’organisation du travail, ce serait trop grave…
Alors dans ces conditions, à quoi cela peut-il servir d’avoir un « marqueur important et fiable de l’état de santé des personnes », si c’est pour fermer les yeux sur les questions qui fâchent ?